Nous n'avons pas en ce moment des points de vue élevés, parce que le monde est affolé par la politique. Ce qui devrait être fait, c'est de dépolitiser la culture et de culturaliser les hommes politiques. Mais en ce moment, tout le monde ne verra que par les yeux de la politique, et l'évasion c'est le sport.
Je crois que nous assistons à un énorme abrutissement, dont les intellectuels sont en grande partie coupables. Ils ne savent pas que la politique qui est, en principe, l'organisation des rapports humains possibles dans la cité, est devenue une énorme désorganisation. En effet, on ne peut pas organiser pour organiser; on organise pour que les gens puissent faire quelque chose; c'est-à-dire on organise pour qu'ils vivent une vie "culturelle". Qu'est-ce que c'est que cette vie culturelle? Eh bien, c'est de faire que les gens puissent penser chacun dans sa solitude en apportant au groupe le fruit de ses méditations, pour que l'individu s'épanouisse, pour qu'il pense. Or, nous sommes subjugués maintenant par la raison d'Etat qui permet tout : les génocides, les massacres, la mise au pas des intellectuels. C'est-à-dire la mort spirituelle.
Je crois que nous assistons à un énorme abrutissement, dont les intellectuels sont en grande partie coupables. Ils ne savent pas que la politique qui est, en principe, l'organisation des rapports humains possibles dans la cité, est devenue une énorme désorganisation. En effet, on ne peut pas organiser pour organiser; on organise pour que les gens puissent faire quelque chose; c'est-à-dire on organise pour qu'ils vivent une vie "culturelle". Qu'est-ce que c'est que cette vie culturelle? Eh bien, c'est de faire que les gens puissent penser chacun dans sa solitude en apportant au groupe le fruit de ses méditations, pour que l'individu s'épanouisse, pour qu'il pense. Or, nous sommes subjugués maintenant par la raison d'Etat qui permet tout : les génocides, les massacres, la mise au pas des intellectuels. C'est-à-dire la mort spirituelle.
Entretien de Eugène Ionesco avec Pierre-André Boutang et Philippe Sollers, publié dans Tel Quel, hiver 1978.

3 commentaires:
A méditer !
Que voilà donc un sujet universel et intemporel! Pas plus tard qu'aujourd'hui, voici ce qu'écrit un journaliste du Devoir (seul quotidien montréalais qui se détache un peu de la médiocrité médiatique ambiante):
http://www.ledevoir.com/2007/05/22/144323.html
Longue vie à la culture désintéressée! Remarque, si en plus elle pouvait me donner du travail, j'aurais rien contre...
Je me pose la question si vraiment c'est une bonne chose de politiser la culture. C'est sûrement une bonne chose que de favoriser la culture, mais est-ce que les politiciens sont les mieux placés pour ça? J'ai souvent l'impression qu'ils n'y connaissent rien...
Dis-moi Rivarottaz, c'est pas trop la galère pour trouver un emploi? Ne déprime pas si tu ne trouves pas tout de suite, ça ne veut pas dire que tu es nul, même si ce n'est pas super agréable de se faire refuser un poste. Courage!!!
Enregistrer un commentaire